Le corse est une langue romane étroitement apparentée au toscan, appartenant au groupe italo-roman et très proche des dialectes d’Italie centrale.
Autrefois, chaque vallée parlait sa propre version du corse. Les deux principales formes parlées de corse que l’on peut distinguer sont celle de la moitié nord, appelée traditionnellement cismontano (en corse cismuntincu), et celle de la moitié sud appelée oltramontano (pumuntincu en corse). On distingue parfois également une zone dite de transition, dans la région d’Ajaccio. L’ensemble des dialectes corses présente une relative unité, en ce sens que des règles au niveau de l’écriture permettent, par exemple, de passer de l’un à l’autre (langue-toit). La ressemblance du lexique entre le nord et le sud varie entre 79 et 89 %. Cette coexistence de l’unité et de la diversité a donné naissance au concept sociolinguistique de langue polynomique.
Nord de la Corse ;
Les idiomes du groupe septentrional cismontano sont parlés sur une zone qui correspond plus ou moins à la Haute-Corse. On les retrouve dans le cap Corse, en Balagne, dans le Niolo, dans les régions de Bastia et de Corte et au nord d’une ligne reliant les villages de Piana, Vico, Vizzavona, Ghisoni et Ghisonaccia. Il y a cependant quelques petites différences. Dans le Cap, on utilise lu, li, la, le comme articles définis, comme en italien mais à la différence du corse. De même à Bastia, on dira ottanta, momento, oliva, ocello, alors qu’en Balagne, dans le Niolo et à Corte on dira plutôt uttanta, mumentu, tuccà, arechja, acellu.
Tous ces dialectes ont en commun le -ebbe du conditionnel. De plus, les lettres associées « st » dans un mot se prononceront « cht » dans un bon quart nord-est de l’île : Bastìa s’y dira «bachti-a». Dans cette même zone, les « a », « e » et « o » précédant un « m » ou un « n » auront tendance à être largement nasalisés : pane se prononcera comme «pan-nè». Et au nord d’une ligne Sari-d’Orcino-Ghisonaccia, de nombreuses consonnes sont voisées lorsqu’elles ne suivent pas une syllabe tonique ni une consonne et ne sont pas en début de phrase : u San Petrone se prononcera [u zɑ̃ɱpeˈdrɔ̃nɛ].
Le dialecte parlé dans l’île de Capraia jusqu’au xxe siècle, aujourd’hui éteint, était largement similaire au corse voisin. Il y a aussi des caractéristiques communes avec les parlers de l’île d’Elbe, particulièrement dans la région de Chiessi et Pomonte.
Zone de transition ;
Il existe une zone de transition dans laquelle on retrouve des phénomènes linguistiques associés avec le cismontano ou l’ oltramontano. C’est le cas des dialectes des régions de Piana, Calcatoggio, Cinarca, Vizzavona (avec un conditionnel de type sud), Fiumorbo (avec le son [ɖ]), la région d’Ajaccio (pluriel féminins en i, son [ɖ] prononcé ghj, mots typiquement septentrionaux tels que cane et accattà au lieu de ghjacaru et cumprà, influence ligure), la région de Gravone, Bastelica et Solenzara (pas de préservation des voyelles courtes latines, seccu, rossu).
Sud de la Corse ;
Les idiomes du groupe sudiste oltramontano sont parlés dans les zones de Sartène, Porto-Vecchio et au sud de la ligne formée par Porticcio, Bastelica, Col di Verde et Solenzara.
Des dialectes notables sont ceux de la région de Taravo (son retroflex -dd- en place de l’historique -ll- : frateddu, suredda, beddu; formes en famiglia, figliolu, vogliu; perte des vocales courtes du latin : seccu, peru, rossu, croci, pozzu), de Sartène (avec préservation des vocales courtes du latin : siccu, piru, russu, cruci, puzzu; modification du -rn- historique pour -rr-: forru, carri, corru; formes de type: piddà, famidda, fiddolu, voddu; imparfait en cantàvami, cantàvani; pluriel masculin en a: l’ochja, i poma;), l’Alta Rocca (similaire au nord de la Sardaigne), et l’intérieur du pays de Porto-Vecchio et Bonifacio (noms masculins toujours en u au singulier : fiumu, paesu, patronu ; noms masculins pluriels toujours en a : i letta, i solda, i ponta, i foca, i balcona ; l’imparfait de type cantàiami, cantàiani).
L’ oltramontano présente quelques caractéristiques communes avec le groupe linguistique sicilien de l’Italie méridionale. Ainsi, comme dans le Mezzogiorno, le son /è/ atone en finale d’un mot n’existe pas: u pastori ou a nazioni contre u pastore ou a nazione au nord.
Le corse du sud est souvent considéré comme plus archaïque linguistiquement, dans le sens où il a subi moins d’évolutions par rapport aux langues mélangées du passé, il a ainsi conservé le u final que l’on trouve en italien médiéval.
Sardaigne ;
Du fait d’une ancienne et forte émigration de Corses sur l’île de la Maddalena, on y parle un corse similaire à celui de Sartène. Le gallurais et le sassarais, dialectes du nord de la Sardaigne, sont également très proches des parlers du sud de la Corse avec lesquels ils forment un continuum linguistique.
Exceptions ;
Les dialectes des villes fortifiées de Bonifacio (bonifacien) et de Calvi (calvais) sont des dialectes liguriens hérités de la période génoise, totalement différents du corse du reste de l’île. Le dialecte d’Ajaccio a été également influencé par le ligure, sans que celui prenne le dessus.
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